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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 5, 1797.djvu/86

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n’a, par sa nature, rien d’analogue à lui ; on veut qu’elle puisse agir et sentir sans le secours de ce corps ; en un mot, on prétend que, privée de ce corps, et dégagée des sens, cette ame sublime pourra vivre pour souffrir, éprouver le bien-être ou sentir des tourmens rigoureux. C’est sur un pareil tas d’absurdités conjecturales que l’on bâtit l’opinion merveilleuse de l’immortalité de l’ame.

Si je demande quels motifs on a de supposer l’ame immortelle, on me répond aussi-tôt, c’est que l’homme, par sa nature, desire d’être immortel ; mais, répliquai-je, votre desir devient-il une preuve de son accomplissement ? Par quelle étrange logique ose-t-on décider qu’une chose ne peut manquer d’arriver, seulement parce qu’on la souhaite ; les impies, continue-t-on, privés des espérances flatteuses d’une autre vie desirent d’être anéantis ! eh bien, ne sont-ils pas autant autorisés à conclure, d’après ce desir, qu’ils seront anéantis, que vous vous prétendez autorisés à conclure, vous, que vous existerez simplement, parce que vous le desirez !

O Juliette, poursuivait cette femme phi-