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comprenez rien, comment pouvez-vous décider affirmativement une chose dont vous êtes incapables de vous former aucune idée ! Pour croire ou pour affirmer quelque chose, il faut au moins savoir en quoi consiste ce que l’on croit et ce que l’on affirme ; croire à l’immatérialité de l’ame, c’est dire que l’on est persuadée de l’existence d’une chose dont il est impossible de se former aucune notion véritable ; c’est croire à des mots sans y pouvoir attacher aucun sens ; affirmer qu’une chose est telle qu’on l’a dit, c’est le comble de la folie et de la vanité.

Que les théologiens sont d’étranges raisonneurs ! dès qu’ils ne peuvent deviner les causes naturelles des choses, ils inventent des causes surnaturelles, ils imaginent des esprits, des Dieux, des causes occultes, des agens inexplicables, ou plutôt des mots bien plus obscurs que les choses qu’ils s’efforcent d’expliquer. Demeurons dans la nature quand nous voudrons nous rendre compte des effets de la nature ; ne nous écartons jamais d’elle quand nous voudrons expliquer ses phénomènes ; ignorons les causes trop déliées pour être saisies par nos organes, et soyons persuadés, qu’en sortant de la nature, nous