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Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 6, 1797.djvu/120

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justice d’avouer qu’elle n’en eut jamais avec moi. Noirceuil vous a bien peinte, me dit-elle, je vois que nous avons la même ame, le même esprit, les mêmes goûts ; nous sommes faites pour vivre ensemble, unissons-nous ; nous irons fort loin ; mais surtout bannissons tous freins, ils ne sont fait que pour les sots ; des caractères élevés, des ames fières, des esprits nerveux comme les nôtres, brisent en se jouant, toutes ces digues populaires, ils savent que le bonheur est au-delà, ils l’atteignent avec courage, en foulant aux pieds les petites loix, les froides vertus et les imbécilles religions de ces hommes de boue, qui ne semblent avoir reçu l’existence que pour déshonorer la nature.

Quelques jours après, Clairwil, dont je commençais à rafoler, vint souper tête à tête avec moi ; ce fut dans cette seconde aventure où nous épanchâmes nos cœurs… où nous nous confiâmes nos goûts, nos sentimens… Oh ! quelle ame que celle de Clairwil, je crois que si le vice même eut habité sur la terre, ce n’eût jamais été qu’au fond de cette ame perverse qu’il eût établi son empire.

Dans un moment de confiance mutuelle,