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battre ou fouetter d’autres femmes ? — Plusieurs fois. — Avez-vous poussé les choses plus loin ? — Permettez-moi, madame, de respecter les secrets du ministre, en le connaissant aussi bien que vous, il est facile de tout deviner. — Lui avez-vous quelquefois vu des projets contre moi ? — Oh ! jamais, madame, je n’ai reconnu pour vous, dans lui, que de la confiance et de la tendresse ; je vous réponds qu’il vous aime beaucoup. — Je le lui rends bien… Je l’adore, j’espère qu’il en est convaincu. Parions donc d’autre chose, puisque vous voulez que je respecte vos secrets ; dites-moi, je vous prie, comment il vous est possible d’attenter à la vie d’un individu qui ne vous a jamais rien fait ? comment la pitié ne réclame-t-elle pas au fond de votre ame en faveur du malheureux que la loi vous charge d’assassiner de sang-froid ?

Soyez bien certaine, madame, me répondit Delcour, qu’aucun de nous ne parvient à ce degré de férocité réfléchie, sans des principes inconnus peut-être aux autres hommes. — Des principes, eh bien, voilà ce que je veux savoir, quels sont-ils ? — Ils prennent leur source dans la plus complète inhumanité ; on nous accoutume dès l’enfance à