Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 6, 1797.djvu/190

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je me suis branlée, et j’ai complettement déchargé sur des idées d’ambition, de cruauté, d’avarice et de vengeance. Il n’est pas un seul projet de crime, quelque fût la passion qui l’inspira, qui n’ait fait circuler dans mes veines le feu subtil de la lubricité : le mensonge, l’impiété, la calomnie, la friponnerie, la dureté d’ame, la gourmandise même, ont produit dans moi ces effets ; et il n’est en un mot, aucune manière d’être vicieuse qui n’ait allumé ma luxure. Ou, son flambeau, si vous l’aimez mieux, ayant produit dans moi l’incendie de tous les vices, en jettant sur tous ce feu divin qui n’appartient qu’à elle, leur a communiqué à tous, cette sensation voluptueuse, que les gens mal organisés semblent n’attendre que de sa main. Assurément voilà mon opinion. — Et c’est aussi la mienne, madame, répondit Delcour, je ne saurais vous le dissimuler plus long-tems. — Que je vous sais gré d’être franc avec moi ; allez, mon cher, je crois vous connaître assez maintenant pour être certaine que vous avez besoin de vous monter la tête au libertinage, quand vous commettez les meurtres qui vous sont ordonnés, ce qui vous les