Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 6, 1797.djvu/369

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mieux encourir toi-même l’éternelle damnation dont tu parles, que de renoncer à la délicieuse jouissance d’en effrayer les autres. Va, Clairwil, interrompis-je, tel est son seul but en développant ce systême ; ce n’est qu’une méchanceté de sa part, mais il n’y croit pas. — Vous vous trompez, j’y crois ; et vous voyez bien que mes actions sont en tout point conformes à ma manière de penser : persuadé que le supplice de la réunion aux mollécules malfaisantes, sera très-médiocre pour l’être aussi malfaisant qu’elles, je me couvre de crimes en ce monde pour avoir moins à souffrir dans l’autre. Quant à moi, dit Clairwil, je m’en souille parce qu’ils me plaisent, parce que je les crois une des manières de servir la nature ; et que rien ne survivant de moi, il importe bien peu comme je me serai conduit dans ce monde.

Nous en étions là, lorsque nous entendîmes une voiture entrer dans la cour ; on annonça Noirceuil ; il parut, conduisant un jeune homme de seize ans, plus beau que l’amour même. Qu’est-ce ceci, dit le ministre ? en venant d’analyser l’enfer, veux-tu me donner l’occasion de le mériter un peu ?