jusqu’à son dernier sou, il voulut faire des plaintes, mais comme je soudoyais fortement la police et que dans ce temps-là avec de l’or on en faisait ce qu’on voulait, le gentilhomme eut ordre de se taire et ses effets m’appartinrent à quelques bijoux près qu’il me fallut céder aux exempts pour jouir tranquillement du reste. — Il ne m’était jamais arrivé de faire un vol, sans qu’un bonheur ne m’arrivât le lendemain, cette bonne fortune-ci fut une nouvelle pratique, mais une de ces pratiques journalières, qu’on peut180) regarder comme les pièces de bœuf d’une maison, [94]celui-ci était un vieux courtisan qui las des hommages qu’il recevait dans les palais des rois, aimait à venir changer de rôle chez des putains. Ce fut par moi, qu’il voulut débuter, il fallait que je lui fisse dire sa leçon, et à chaque faute qu’il y faisait, il était condamné à se mettre à genoux, et à recevoir tantôt sur les mains, tantôt sur le derrière de vigoureux coups de ferrules de cuir, telles que celles, dont les régents font usage en classe, c’était à moi de m’apercevoir quand il était bien en feu, je m’emparai alors de son vit et je le secouais adroitement toujours en le grondant, en l’appellant : „petit libertin“, „petit mauvais sujet“ et autres invectives enfantines, qui le faisaient voluptueusement décharger. Cinq fois de la semaine pareille cérémonie devait s’exécuter chez moi, mais toujours avec une fille nouvelle et bien instruite, et je recevais pour cela 25 louis par mois. Je connaissais tant de femmes dans Paris, qu’il me fut aisé de lui promettre ce qu’il demandait, et de le lui tenir, j’ai eu dix ans dans ma pension ce charmant écolier qui s’avisa vers cette époque d’aller prendre d’autre leçons en enfer.181) Cependant je pre-
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