le roman étant, s’il est possible de s’exprimer ainsi, le tableau des mœurs séculaires, est aussi essentiel que l’histoire, au philosophe qui veut connaître l’homme ; car le burin de l’une, ne le peint que lorsqu’il se fait voir ; et alors ce n’est plus lui ; l’ambition, l’orgueil couvrent son front d’un masque qui ne nous représente que ces deux passions, et non l’homme ; le pinceau du roman, au contraire, le saisit dans son intérieur… le prend quand il quitte ce masque, et l’esquisse bien plus intéressante, est en même temps bien plus vraie : voilà l’utilité des romans ; froids censeurs qui ne les aimez pas, vous ressemblez à ce cul-de-jatte qui disait aussi : et pourquoi fait-on des portraits ?
S’il est donc vrai que le roman soit utile, ne craignons point de tracer ici quelques-uns des principes que nous croyons nécessaires à porter ce genre à sa perfection ; je sens bien qu’il est difficile de remplir cette tâche sans donner des armes contre moi ; ne deviens-je pas doublement coupable de n’avoir pas bien fait, si je prouve que je sais ce qu’il faut pour faire bien. Ah ! laissons ces vaines considérations, qu’elles s’immolent à l’amour de l’art.