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Page:Sade - Les Crimes de l’amour, 1881.djvu/128

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La connaissance la plus essentielle qu’il exige est bien certainement celle du cœur de l’homme. Or, cette connaissance importante, tous les bons esprits nous approuveront sans doute en affirmant qu’on ne l’acquiert que par des malheurs et par des voyages ; il faut avoir vu des hommes de toutes les nations pour les bien connaître, et il faut avoir été leur victime pour savoir les apprécier ; la main de l’infortune, en exaltant le caractère de celui qu’elle écrase, le met à la juste distance où il faut qu’il soit pour étudier les hommes ; il les voit de là, comme le passager aperçoit les flots en fureur se briser contre l’écueil sur lequel l’a jeté la tempête ; mais dans quelque situation que l’ait placé la nature ou le sort, s’il veut connaître les hommes, qu’il parle peu quand il est avec eux ; on n’apprend rien quand on parle, on ne s’instruit qu’en écoutant ; et voilà pourquoi les bavards ne sont communément que des sots.

Ô toi qui veux parcourir cette épineuse carrière ! ne perds pas de vue que le romancier est l’homme de la nature, elle l’a créé pour être son peintre ; s’il ne devient pas l’amant