Page:Sade - Les crimes de l'amour, Nouvelles héroïques et tragiques, tome 3, 1799.djvu/62

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disait-il, mais si elle en aime un autre que mon fils, voilà une diversion déjà favorable pour moi, voilà un outrage aux sentimens qu’elle lui a jurés, et de ce moment une facilité qu’elle m’offre pour l’entraîner dans d’autres travers. Même distraction dans l’intérieur, Laurence n’était servie que par les pages de Charles, et on avait soin de l’entourer des plus beaux[1].

Parmi ceux-ci, un préféré par Charles, âgé de seize ans, et qu’on nommait Urbain, parut bien innocemment fixer un peu plus les regards de Laurence. Urbain était d’une figure délicieuse, l’air de la santé et de l’embonpoint, quoique sa taille et tous ses membres fussent d’une régularité parfaite ; il avait de l’esprit, de la gentillesse, de l’effronterie, et tout cela mêlé de tant de grâces, qu’on lui pardonnait toujours tout : sa vivacité, ses saillies, la plaisante tournure de son ima-

  1. Il ne faut pas oublier qu’alors, ces pages sortis des plus grandes maisons, se trouvaient souvent parens de leurs maîtres.