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prouver, s’appliquera à mieux faire encore ; il voudra surmonter cette calomnie dont il se croyoit à l’abri, et ses belles actions n’aquéreront qu’un degré d’énergie de plus. Ainsi, dans le premier cas, le calomniateur aura produit d’assez bons effets, en grossissant les vices de l’homme dangereux ; dans le second, il en aura produit d’excellens, en contraignant la vertu à s’offrir à nous toute entiere. Or, je demande maintenant sous quel rapport le calomniateur pourra vous paroître à craindre, dans un gouvernement sur-tout où il est si essentiel de connoître les méchans, et d’augmenter l’énergie des bons ? Que l’on se garde donc bien de prononcer aucune peine contre la calomnie, considérons-la sous le double rapport d’un fanal et d’un stimulant, et dans tous les cas comme quelque chose de très utile ; le législateur, dont toutes les idées doivent être grandes comme l’ouvrage auquel il s’applique, ne doit jamais étudier l’effet du délit qui ne frappa qu’individuellement ; c’est son effet en masse qu’il doit examiner, et quand il observera de cette maniere les effets qui résultent de la calomnie, je le défie d’y trouver rien de punissable, je défie qu’il puisse placer quelqu’ombre de justice à la loi qui