je vous souhaite, n’approche jamais de votre
cœur ; qu’est-ce que l’amour ? On ne peut le
considérer, ce me semble, que comme l’effet
résultatif des qualités d’un bel objet sur nous :
ces effets nous transportent ; ils nous enflament,
si nous possédons cet objet ; nous voilà contens,
s’il nous est impossible de l’avoir, nous
nous désespérons ; mais quelle est la base de ce
sentiment ?… Le desir : quels sont les suites
de ce sentiment ? La folie ; tenons-nous-en
donc au motif, et garantissons-nous des effets ;
le motif est de posséder l’objet ; eh bien ! tâchons
de réussir, mais avec sagesse ; jouissons-en,
dès que nous l’avons ; consolons-nous :
dans le cas contraire, mille autres objets semblables,
et souvent bien meilleurs, nous consoleront
de la perte de celui-là ; tous les hommes,
toutes les femmes se ressemblent, il n’y
a point d’amour qui résiste aux effets d’une
réflexion saine : oh, quelle duperie que cette
ivresse qui, absorbant en nous, le résultat des
sens, nous met dans un tel état que nous ne
voyons plus, que nous n’existons plus que par
cet objet follement adoré ; est-ce donc là vivre ;
n’est-ce pas bien plutôt se priver volontairement
de toutes les douceurs de la vie ? N’est-ce
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