Page:Sagard - Le Grand voyage du pays des Hurons (Avec un dictionnaire de la langue huronne), Librairie Tross, 1865.djvu/120

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pour l’ordinaire, et les pere et mere apres, et n’y a point d’entre-deux ou de separation, ny de pied, ny de cheuet, non plus en haut qu’en bas, et ne font autre chose pour dormir, que de se coucher en la mesme place où ils sont ||119 assis, et s’affubler la teste auec leur robe, sans autre couuerture ny lict.

Ils emplissent de bois sec, pour brusler en hyuer, tout le dessous de ces establies, qu’ils appellent Garihagueu et Eindichaguet : mais pour les gros troncs ou tisons appellez Aneincuny, qui seruent à entretenir le feu, esleuez vn peu en haut par vn des bouts, ils en font des piles deuant leurs Cabanes, ou les serrent au dedans des porches, qu’ils appellent Aque. Toutes les femmes s’aydent à faire cette prouision de bois, qui se fait dès le mois de Mars, et d’Auril, et auec cet ordre en peu de iours chaque mesnage est fourny de ce qui luy est nécessaire.

Ils ne se seruent que de tres-bon bois, aymant mieux l’aller chercher bien loin, que d’en prendre de vert, ou qui fasse fumée ; c’est pourquoy ils entretiennent tousiours vn feu clair auec peu de bois : que s’ils ne rencontrent point d’arbres bien secs, ils en abattent de ceux qui ont les branches seiches, lesquelles ils mettent par esclats, et couppent d’vne égale longueur, comme les cotrays de Paris. Ils ne se seruent point du fagotage, non plus que du tronc des plus gros arbres ||120 qu’ils abattent ; car ils les laissent là pourrir sur la terre, pource qu’ils n’ont point de scie pour les scier, ny l’industrie de les mettre en pieces qu’ils ne soient secs et pourris. Pour nous qui n’y prenions pas garde de si prés, nous nous contentions de celuy qui estoit plus proche de nostre Ca-