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Page:Sagard - Le Grand voyage du pays des Hurons (Avec un dictionnaire de la langue huronne), Librairie Tross, 1865.djvu/174

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en buys, de la grosseur d’vne noix, assez bien faicte, beaucoup d’entr’eux la croyaient auoir esté d’vn enfant viuans, non que le leur persuadasse : mais leur simplicité leur faisoit croire ainsi, comme aux femmes de me demander à emprunter mon capuce et manteau en temps de pluye, ou pour aller à quelque festin : mais elles me prioyent en vain, ||195 comme il est aysé à croire. Pour nos Socquets ou Sandales, les Sauuages et Sauuagesses les ont presque tous voulu esprouuer et chausser, tant ils les admiraient et trouuoient commodes, me disant apres, Auiel, Saracogna, Gabriel, fais-moy des souliers ; mais il n’y auoit point d’apparence, et estoit hors de mon pouuoir de leur satisfaire en cela, n’ayant le temps, l’industrie, ny les outils propres : et de plus, si i’eusse vne fois commencé de leur en faire, ils ne m’eussent donné aucun relasche, ny temps de prier Dieu, et de croire qu’ils se fussent donné la peine d’apprendre, ils sont trop faineants et paresseux : car ils ne font rien du tout, que par la force de la necessité, et voudroient qu’on leur donnast les choses toutes faictes, sans auoir la peine d’y aider seulement du bout du doigt ; comme nos Canadiens, qui ayment mieux se laisser mourir de faim, que de se donner la peine de cultiuer la terre, pour auoir du pain au temps de la necessité.