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folles ceremonies, et en la hayne de tous leurs vices et mauuaises habitudes : pource que ce n’est pas assez d’estre baptizé pour aller en Paradis ; mais il faut de plus viure Chrestiennement, et dans les termes et les loix que Dieu et son Eglise nous ont prescrites : autrement il n’y a qu’vn Enfer pour les mauuais, et non point vn Paradis. Et puis ie diray auec verité, que si on n’establit des Colonies de bons et vertueux Catholiques dans tous ces pays Sauuages, que iamais le Christianisme n’y sera bien affermy, encore que des Religieux s’y donnassent toutes les peines du monde : car autre chose est d’auoir affaire à des peu-||240ples policez, et autre chose est de traiter auec des peuples Sauuages, qui ont plus besoin d’exemple d’vne bonne vie, pour s’y mirer, que de grand’ Theologie pour s’instruire, quoy que l’vn et l’autre soit nécessaire. Et par ainsi nos Peres ont faict beaucoup d’en auoir baptizé plusieurs, et d’en auoir disposé vn grand nombre à la foy et au Christianisme.

Et puis que nous sommes sur le suiet du sainct Baptesme, ie ne passeray sous silence, qu’entre plusieurs Sauuages Canadiens, que nos Peres y ont baptisez, soit de ceux qu’ils ont fait conduire en France, ou d’autres qu’ils ont baptisez et retenus sur les lieux, les deux derniers meritent de vous en dire quelque chose. Le Pere Ioseph le Caron, Superieur de nostre Conuent de sainct Charles, nourrissoit et esleuoit, pour Dieu, deux petits Sauuages Canadiens, l’vn desquels, fils du Canadien que nous sur-nommons le Cadet, apres avoir esté bien instruit en la foy et doctrine Chrestienne, se resolut de viure à l’aduenir, suyuant la loi que nos Peres lui auoient enseignée, et auec ins-