Page:Saint-Amand - Madagascar, 1857.djvu/12

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La muscade, le thé, le girofle vermeil,
Arômes enivrants mûris par le soleil,
Le sucre que maudit l’austère philanthrope,
Vont payer les produits exportés par l’Europe.
Aux luttes du commerce une indicible ardeur
Entraîne les humains en quête de bonheur.
Sur ses ailes de feu supprimant les espaces,
Confondant les tribus, les peuples et les races,
La vapeur a jeté dans son fougueux élan
Les arcades d’un pont par dessus l’océan.
De tous les continents la fraternelle étreinte
Accomplira bientôt la parabole sainte,
Le règne de la paix, le règne de l’amour,
La chute de Satan détrôné sans retour.
Ô rêve éblouissant caressé par nos pères,
Ô jour qui doit sécher bien des larmes amères,
Où pour tous ses enfants la vieille Humanité
Pourra trouver enfin bonheur et liberté !

Avant ce jour béni dont nous voyons l’aurore,
Si pourtant le canon retentissait encore,
S’il fallait relever l’étendard des combats
Et trancher par le fer d’insolubles débats,
Dans quel large champ-clos, dans quelle vaste arène
Viendra se dénouer le drame de la haine ?
Du sol des continents les avides sillons
Ne s’engraisseront plus du sang des bataillons.
Sur un autre terrain les joûtes homicides,
Les meurtres brevetés, les luttes fratricides
De Mars inassouvi calmeront les fureurs.
Les flots reflèteront de tragiques lueurs ;
C’est là que trônera la discorde cruelle ;
Là viendra se vider toute grande querelle,