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Page:Saint-Just - Œuvres complètes, éd. Vellay, II, 1908.djvu/328

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conspirais avec Mirabeau, avec Dumouriez, avec Hébert, avec Hérault-Séchelles. Danton, tu as servi la tyrannie : tu fus, il est vrai, opposé à Lafayette ; mais Mirabeau, d’Orléans, Dumouriez, lui furent opposés de même. Oserais-tu nier avoir été vendu à ces trois hommes, les plus violents conspirateurs contre la Liberté ? Ce fut par la protection de Mirabeau que tu fus nommé administrateur du département de Paris, dans le temps où l’assemblée électorale était décidément royaliste. Tous les amis de Mirabeau se vantaient hautement qu’ils t’avaient fermé la bouche. Aussi tant qu’a vécu ce personnage affreux, tu es resté presque muet. Dans ce temps-là tu reprochas à un patriote rigide, dans un repas, qu’il compromettait la bonne cause, en s’écartant du chemin où marchaient Barnave et Lameth, qui abandonnaient le parti populaire. Dans les premiers éclairs de la Révolution, tu montras à la cour un front menaçant ; tu parlais contre elle avec véhémence. Mirabeau, qui méditait un changement de dynastie, sentit le prix de ton audace, il te saisit. Tu t’écartas dès-lors des principes sévères, et l’on n’entendit plus parler de toi jusqu’au massacre du Champ-de-Mars. Alors tu appuyas aux Jacobins la motion de Laclos, qui fut un prétexte funeste et payé par les ennemis du peuple, pour déployer le drapeau rouge et essayer la tyrannie. Les patriotes, qui n’étaient pas initiés dans ce complot, avaient combattu inutilement ton opinion sanguinaire. Tu fus nommé rédacteur avec Brissot de la pétition du Champ-de-Mars, et vous échappâtes à la fureur de Lafayette, qui fit massacrer deux mille patriotes. Brissot erra, depuis, paisiblement dans Paris, et toi, tu fus couler d’heureux jours à Arcis-sur-Aube, si toutefois celui qui conspirait contre sa patrie, pouvait être heureux. Le calme de ta retraite à Arcis-sur-Aube se conçoit-il ? Toi l’un des auteurs de la pétition, tandis que ceux qui l’avaient signée avaient été, les uns chargés de fers, les autres massacrés. Brissot et toi étiez-vous donc des objets de reconnaissance pour la tyrannie, puisque vous n’étiez point pour elle des objets de haine et de terreur ?