Aller au contenu

Page:Saint-Just - Œuvres complètes, éd. Vellay, II, 1908.djvu/342

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

déjà poursuivi par l’image de son supplice, criait il y a trois décades : "On veut me perdre ; défendez-moi".

Un innocent parle-t-il de se défendre ? a-t-il des pressentiments de terreur avant qu’on ait parlé de lui ? Les comités ont gardé prudemment le silence, et l’opinion et le peuple accusaient avant moi ceux que j’accuse. Ils s’accusaient, ils se désignaient eux-mêmes, car nous n’avions point parlé d’eux, ils se préparaient à demander si nous voulons détruire la représentation, parce que nous les accusons, et ceux-là nous font-ils un crime d’avoir accusé Brissot, Chabot et leurs complices ? veut-on les réhabiliter. Soyez donc inflexibles : c’est l’indulgence qui est féroce, puisqu’elle menace la Patrie.

Quand les restes de la faction d’Orléans, dévoués aujourd’hui à tous les attentats contre la Patrie, n’existeront plus, vous n’aurez plus d’exemple à donner, vous serez paisibles, l’intrigue n’abordera plus cette enceinte sacrée, vous vous livrerez à la législation et au gouvernement, vous sonderez ses profondeurs, et vous déroberez le feu du ciel pour animer la République tiède encore, et enflammer l’amour de la Patrie et de la justice : alors il ne restera plus que des patriotes ! alors sera détruite l’illusion des intrigants, qui, depuis cinq ans ayant pris le masque de la révolution, voudraient aujourd’hui leur faire partager leur opprobre, en faisant dire que les patriotes seront tous déshonorés les uns après les autres.

Ainsi donc, parce que des lâches et des ennemis de l’humanité se sont faits prophètes, la Divinité en aurait perdu de sa gloire ! parce que des hypocrites auraient usurpé la réputation du patriotisme, l’éclat du patriotisme serait obscurci ! Ceux que je dénonce n’ont jamais été patriotes, mais aristocrates adroits et plus dissimulés que ceux de Coblentz.

Toutes les réputations qui se sont écroulées étaient des réputations usurpées par l’aristocratie ou par des factions criminelles. Ceux qui nous reprochent notre sévérité, aimeraient-ils mieux que nous fussions injustes ? Peu importe que le temps ait conduit des vanités diverses à l’échafaud, au cimetière, au néant pourvu que la liberté