Page:Saint-Just - Œuvres complètes, éd. Vellay, II, 1908.djvu/490

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Quel language vais-je vous parler ? Comment vous peindre des erreurs dont vous n’avez aucune idée ? et comment rendre sensible le mal qu’un mot décèle, qu’un mot corrige ?

Vos Comités de sûreté générale et de salut public m’avaient chargé de vous faire un rapport sur les causes de la comotion sensible qu’avait éprouvée l’opinion publique dans ces derniers temps.

La confiance des deux comités m’honorait, mais quelqu’un cette nuit a flétri mon cœur, et je ne veux parler qu’à vous.

J’en appelle à vous de l’obligation que quelques-uns semblaient m’imposer de m’exprimer contre ma pensée.

On a voulu répandre que le gouvernement était divisé : il ne l’est pas, une altération politique, que je vais vous rendre, a seulement eu lieu.

Ils ne sont point passés, tous les jours de gloire ! et je préviens l’Europe de la nullité de ses projets contre la vigueur du gouvernement.

Je vais parler de quelques hommes que la jalousie me paraît avoir portés à accroître leur influence et à concentrer dans leurs mains l’autorité par l’abaissement ou la dispersion de ce qui gênait leurs desseins, en outre en mettant à leur disposition la milice citoyenne de Paris, en supprimant ses magistrats pour s’attribuer leurs fonctions; qu’ils me paraissent avoir projeté de neutraliser le gouvernement révolutionnaire et tramé la perte des meilleurs gens de bien, pour dominer plus tranquillement.

Ces membres avaient concouru à me charger du rapport. Tous yeux ne m’ont point paru dessillés sur eux, je ne pouvais les accuser en leur propre nom, il eût fallu discuter longtemps dans l’intérieur le problème de leur entreprise, ils croyaient que, chargés par eux de vous parler, j’étais contraint par respect humain de tout concilier, ou d’épouser leurs vues et de parler leur langue.

J’ai profité d’un moment de loisir que m’a laissé leur espérance, pour me préparer à leur faire mesurer devant vous toute la profondeur de l’abîme où ils se sont précipités.