Page:Saint-Just - Œuvres complètes, éd. Vellay, II, 1908.djvu/496

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

toujours la meilleure. Ce n’est qu’après un siècle que la postérité plaintive verse des pleurs sur la tombe des Gracques et sur la roue de Sidney. Les factions en divisant un peuple, mettent la fureur de parti à la place de la liberté, le glaive des lois et les poignards des assassins s’entrechoquent, on n’ose plus parler ni se taire, les audacieux, qui se placent à la tête des partis, forcent les citoyens à se prononcer entre le crime et le crime. Ainsi, sous le règne d’Hébert et de Danton, tout le monde était furieux et farouche par peur.

C’est pourquoi le vœu le plus tendre pour sa patrie que puisse faire un bon citoyen et le bienfait le plus doux qui puisse descendre des mains de la Providence sur un peuple libre, le fruit le plus précieux que puisse recueillir une nation généreuse de sa vertu, c’est la ruine, c’est la chute des factions. Quoi ? l’amitié s’est-elle envolée de la terre ? la jalousie présidera-t-elle aux mouvements du corps social ? et, par le prestige de la calomnie, perdra-t-on ses frères, parce qu’ils sont plus sages et plus magnanimes que nous ?

La renommée est un vain bruit. Prêtons l’oreille sur les siècles écoulés. Nous n’entendrons plus rien, ceux qui, dans d’autres temps, se promèneront parmi nos urnes, n’en entendront pas davantage. Le bien, voilà ce qu’il faut faire, à quelque prix que ce soit, en préférant le titre de héros mort à celui de lâche vivant !

Il ne faut point souffrir que le crime triomphe, ni que l’intensité de la morale publique diminue de sa force contre les méchants. La puissance des lois et de la raison arrive à la suite, et tout le monde tremble sans distinction, il n’y a plus que des esclaves épouvantés.

Si vous voulez que les factions s’éteignent et que personne n’entreprenne de s’élever sur les débris de la liberté publique par les lieux communs de Machiavel, rendez la politique impuissante en réduisant tout à la règle froide de la justice, gardez pour vous la suprême influence : dictez des lois impérieuses à tous les partis, les lois n’ont point de passions qui les divisent et qui les fassent dissi-