Aller au contenu

Page:Saint-Just - Œuvres complètes, éd. Vellay, II, 1908.djvu/497

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

muler. Les lois sont sévères, et les hommes ne le sont pas toujours, un masque impénétrable peut les couvrir longtemps. Si les lois protègent l’innocence, l’étranger ne peut les corrompre. Mais si l’innocence est le jouet des viles intrigues, il n’y a plus de garantie dans la cité. Il faut s’enfuir dans les déserts pour y trouver l’indépendance et des amis parmi des animaux sauvages. Il faut laisser un monde où l’on n’a plus l’énergie ni du crime ni de la vertu, et où il n’est resté que l’épouvante et le mépris !

C’est pourquoi je demande quelques jours encore à la providence pour appeler sur les institutions les méditations du peuple français et de tous ses législateurs. Tout ce qui arrive aujourd’hui dans le gouvernement n’aurait point eu lieu sous leur empire; ils seraient vertueux, et n’auraient point pensé au mal, ceux dont j’accuse ici les prétentions orgueilleuses ! Il n’y a pas longtemps peut-être qu’ils ont laissé la route frayée par la vertu.

Quand je revins pour la dernière fois de l’armée, je ne reconnus plus quelques visages, les membres du gouvernement étaient épars sur les frontières et dans les bureaux; les délibérations étaient livrées à deux ou trois hommes avec le même pouvoir et la même influence que le comité même, qui se trouvait presque entièrement dispersé, soit par des missions, soit par maladie, soit par les procès intentés aux autres pour les éloigner. Le gouvernement à mes yeux a véritablement été envahi par deux ou trois hommes. C’est pendant cette solitude qu’ils me semblent avoir conçu l’idée très dangereuse d’innover dans le gouvernement et de s’attirer beaucoup d’influence.

A mon retour, comme je l’ai dit, tout était changé, le gouvernement n’était point divisé, mais il était épars, et abandonné à un petit nombre, qui, jouissant d’un absolu pouvoir, accusa les autres d’y prétendre, pour le conserver.

C’est dans ces circonstances qu’on a conçu la procédure d’hommes innocents, qu’on a tenté d’armer contre eux de très injustes préventions. Je n’ai point à m’en plaindre, on m’a laissé paisible comme un citoyen sans prétentions et qui marchait seul et c’est par erreur que, par le suffrage