Page:Saint-Just - Œuvres complètes, éd. Vellay, II, 1908.djvu/518

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Il y a eu, dans les gouvernements, plus d’habiles gens que de gens vertueux en place. - La modestie d’un héros ne m’en impose pas. Si vous louez la modestie d’un homme, que ferait-il de plus dangereux pour la liberté, s’il montrait de l’orgueil ?

On dit ordinairement : Le citoyen est celui qui participe aux honneurs, aux dignités ; on se trompe. Le voici, le citoyen : c’est celui qui ne possède pas plus de biens que les lois ne permettent d’en posséder ; celui qui n’exerce point de magistrature et est indépendant de la responsabilité de ceux qui gouvernent.

Quiconque est magistrat n’est plus du peuple. Il ne peut entrer dans le peuple aucun pouvoir individuel. Si les autorités faisaient partie du peuple, elles seraient plus puissantes que lui. Les autorités ne peuvent affecter aucun rang dans le peuple. Elles n’ont de rang que par rapport aux coupables et aux lois. Un citoyen vertueux doit être plus considéré qu’un magistrat…

Lorsqu’on parle à un fonctionnaire, on ne doit pas dire citoyen ; ce titre est au-dessus de lui.

Un gouvernement républicain a la vertu pour principe ; sinon, la terreur. Que veulent ceux qui ne veulent ni vertu ni terreur ?…

La force ne fait ni raison ni droit ; mais il est peut¬-être impossible de s’en passer, pour faire respecter le droit et la raison…

Un gouvernement faible est très pesant sur le peuple. Les membres du gouver¬nement sont libres, le peuple ne l’est pas…

On dit qu’un gouvernement vigoureux est oppressif ; on se trompe : la ques¬tion est mal posée. II faut, dans le gouvernement, justice. Le gouvernement qui l’exerce n’est point vigoureux et oppressif pour cela, parce qu’il n’y a que le mal qui soit opprimé…

On a objecté qu’on ne trouverait point assez d’hommes pour exercer la cen¬sure ; mais il faut plus de lumières et