Page:Saint-Just - Œuvres complètes, éd. Vellay, II, 1908.djvu/523

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


Ceci posé, je passe à l’examen, et de notre économie, et de nos mœurs. Ces deux choses sont pleines d’analogie : on ne peut guère les traiter séparément.

Il n’est guère de gouvernement qui puisse résister aux vices de son système économique. Les monnaies ont, dans tout État, une souveraine influence : le peu d’attention que nous y avons fait doit avoir nourri, chez les ennemis de la Révolution française, l’espérance de la voir un jour s’absorber. Nos victoires ont moins porté d’effroi dans l’Europe que n’y en porte¬raient soudain un sage plan d’économie et un système monétaire d’une exécution simple.

Je n’entends point, par un système monétaire, des coins nouveaux, de nou¬velles dénominations de valeurs. Ces choses ont leur prix, mais n’appartiennent point à ce sujet.

Il s’agit de rendre à l’avenir impossible ou très difficile la falsification des monnaies et de découvrir sur-le-champ les fausses monnaies qui circulent. Il s’agit de simplifier le système et la perception des tributs, en les proportionnant aux profits des citoyens. Il s’agit d’ôter de la perception la dureté du fisc. Un gouvernement libre doit s’expliquer sincèrement et généreusement avec le peuple.

Jamais on n’a plus senti qu’aujourd’hui la nécessité des finitions nettes, surtout en finances : car, depuis la Révolution, toutes les idées d’économie ont été vues au travers d’un prisme.

Je vais donc essayer de marquer la progression des erreurs d’économie qui nous sont venues, soit des périls pressants, soit des insinuations étrangères, et quelle a été leur influence sur les mœurs.

En 1789, le numéraire se trouva resserré, soit par la cour qui conspirait, soit par la faute des riches particuliers qui projetaient leur émigration. Les banques transportèrent au-dehors et le commerce et les valeurs du crédit français.

Il se fit dans l’économie une révolution non moins étonnante que celle qui survint dans le gouvernement : on y fit moins d’attention. Les monnaies étaient resserrées, les denrées le furent aussi : chacun voulut mettre à l’abri ce qu’il possédait. Cette défiance et cette avarice ayant détruit