Page:Saint-Saëns - Portraits et Souvenirs, Société d’édition artistique.djvu/169

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exécution, il s’ensuivit que « l’Air de Bertoni », comme on l’appelait, eut un succès énorme.

J’aurais mieux aimé, pour ma part, le récitatif et le changement à vue ! mais on voulait faire durer la pièce, qui est courte, le plus longtemps possible. En fin de compte, au théâtre, le succès justifie tout.

Il justifie quelquefois d’étranges choses, comme, par exemple, l’idée de substituer au morceau final de la partition : l’Amour triomphe, le chœur final d’Écho et Narcisse. Ce chœur est charmant, et comme il n’y a pas d’apparence qu’on reprenne jamais Écho et Narcisse, c’est une bonne occasion de l’entendre ; soit ! Mais l’Amour triomphe termine la soirée par un cri de joie qui n’est pas à dédaigner après tant de larmes. On l’a trouvé un peu vulgaire ; qu’importe, si l’auteur n’était pas du même avis ?

Il resterait, après cette belle restauration d’Orphée pour contralto, à nous faire entendre l’Orphée pour ténor, tel que Gluck l’avait récrit pour l’Opéra, avec le ballet qui termine la pièce à l’ancienne mode. Ce ne serait pas très facile, à cause des changements qu’a subis le diapason depuis cette époque ; quelques transpositions seraient nécessaires, aucun ténor ne pouvant s’accommoder de la tessiture du rôle d’Orphée tel qu’il est noté dans la partition ; mais difficulté n’est pas impossibilité, et il se pourrait bien que l’Opéra nous donnât cette fête quelque jour.