Aller au contenu

Page:Saint-Saëns - Portraits et Souvenirs, Société d’édition artistique.djvu/186

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

où je faisais mes dévotions, la Maison familiale avec ses joies naïves et un peu bourgeoises, me semblait tout naturel ainsi qu’à bien d’autres. De nos jours, on ne sort plus du Temple : on y vit, on y dort ; mais comme le diable n’abandonne pas, ses droits, on s’échappe en cachette pour aller rire à l’opérette ou au café-concert. Mieux valait peut-être l’Opéra-Comique ouvertement accepté et cultivé ; là, du moins, les auteurs ne pouvaient se présenter sans savoir leur métier, les chanteurs sans avoir de la voix et du talent. Tout le monde l’aimait alors ; on était fier du genre national, on n’avait pas encore imaginé d’en rougir. Comme des nefs pavoisées, les chefs-d’œuvre du genre voguaient à pleines voiles au vent du succès. Quelles soirées et quels triomphes ! Venu trop tard pour entendre Mme Damoreau qui fut, paraît-il, un éblouissement, j’eus le bonheur de voir la floraison merveilleuse des Miolan, des Ugalde, des Caroline Duprez, des Faure-Lefebvre ; n’ai-je pas entendu, un soir, le Toréador et l’Ambassadrice avec Mmes Ugalde et Miolan-Carvalho comme interprètes ! Le côté masculin n’était pas moins brillant avec Roger, Faure, Jourdan, Bataille et tant d’autres… Ceux-là mêmes qui n’étaient pas de grands chanteurs étaient précieux pour le soin qu’ils mettaient à conserver les traditions, à compléter un ensemble de premier ordre.

Tout aurait marché pour le mieux si la Maison et le Temple dussent vécu en bonne intelligence ;