Page:Saint-Saëns - Portraits et Souvenirs, Société d’édition artistique.djvu/214

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ou à Schumann existent déjà dans ces œuvres merveilleuses. Haydn possède un atticisme étonnant, analogue à celui de nos écrivains français du temps passé. Il sait toujours s’arrêter à temps, et sa musique n’engendre jamais l’ennui. Elle n’est ni shakespearienne, ni byronnienne, c’est évident ; Haydn n’était pas un agité, son style reflète la sérénité de sa belle âme. Est-ce une raison pour écarter ses œuvres ? Une galerie de tableaux se couvrirait de ridicule, si elle remisait au grenier un Pérugin, sous prétexte qu’on n’y trouve pas les effets troublants d’un Ruysdaël ou d’un Delacroix. Il en est d’un répertoire de concert comme d’une galerie de peinture : tout ce qui est bon doit y trouver place. Le public, mesurant volontiers la valeur des œuvres à l’intensité des sensations qu’elles lui font éprouver, se trompe du tout au tout : c’est l’élévation des idées, leur originalité, la profondeur du sentiment et la beauté du style qui font la valeur des œuvres, non le trouble plus ou moins grand que leur audition amène dans le système nerveux. La recherche de la sensation, lorsqu’elle devient le but de la musique, la tue à bref délai, amenant en peu de temps une monotonie insupportable et une exagération mortelle.

Avec Mozart, depuis que les éditeurs Breitkopf et Haertel ont publié ses œuvres complètes, nous sommes en possession d’une mine inépuisable. Mozart improvisait constamment : il y a un choix à faire dans le monde des œuvres qu’il nous a laissées ;