Page:Saint-Saëns - Portraits et Souvenirs, Société d’édition artistique.djvu/249

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ainsi toutes les fois qu’un i, précédant une voyelle, fera avec elle deux syllabes, et que le mot se terminera par un e muet ; et si l’l, suivi d’un e muet, termine un mot, le poète devra mettre ce mot devant une autre voyelle, ou le placer à la fin du vers. En prose un pareil mot se place aussi bien devant une consonne, et alors on ne prononce pas l’e muet.

Que fera le musicien ? Sacrifira-t-il les e muets ? Voltaire le conseillait. Je ne vois que Victor Massé qui l’ait osé franchement, dans la chanson à boire de Galathée ; et là cette suppression fait merveille par l’impression d’ivresse, de débraillé qu’elle fait naître, mais qui ne saurait être à sa place dans tous les cas.

Réunira-t-il en une seule syllabe les i-a, i-é, i-o, i-on, etc. ?

Un jour, j’eus l’occasion d’entendre une jeune cantatrice à qui son professeur avait fait apprendre les couplets d’Haydée :

    Il dit qu’à sa noble patrie
    Dont l’honneur lui fut confié,
    Il aurait tout sacrifié.

Auber a mis quatre notes sur fut confié, sur sacrifié. Le professeur, désireux de faire chanter « comme on parle », avait imaginé de réunir deux notes sur fut, deux notes sur sa, et de faire prononcer fié en une seule syllabe, sur une seule note. L’effet était horrible, d’une vulgarité repoussante. Essayez et vous verrez.