cour de Rome, Luther a rendu un service capital à la civilisation ; sans lui, le papisme eût complètement asservi l’esprit humain aux idées superstitieuses, en faisant totalement perdre de vue la morale. C’est à Luther qu’on doit la dissolution d’un pouvoir spirituel qui n’était plus en rapport avec l’état de la société. Mais Luther ne pouvait combattre les doctrines ultramontaines sans essayer de réorganiser lui-même la religion chrétienne. C’est dans cette seconde partie de sa réforme, c’est dans la partie organique de ses travaux que Luther a laissé beaucoup à faire à ses successeurs : la religion protestante, telle que Luther l’a conçue, n’est encore qu’une hérésie chrétienne. Certainement Luther avait raison de dire que la cour de Rome avait quitté la direction donnée par Jésus à ses apôtres ; certainement il avait raison de proclamer que le culte et le dogme établis par les papes n’étaient point propres à fixer l’attention des fidèles sur la morale chrétienne, et qu’au contraire ils étaient de nature à ne les faire considérer que comme un accessoire de la religion ; mais de ces deux vérités incontestables Luther n’avait pas le droit de conclure que la morale devait être enseignée aux fidèles de son temps
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