Aller au contenu

Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 1.djvu/326

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

à Landau, dans une chaise de M. de Barbezieux, et des gens à lui outre les siens pour la conduire plus diligemment, et Lacour, capitaine des gardes de M. le maréchal de Lorges, qui avoit été dépêché sur son extrémité. Le roi l’avoit entretenu près d’une heure à Marly, sur l’état de son général et de l’armée, avoit lui-même consulté Fagon son premier médecin, et avoit paru extrêmement sensible à ce grand accident. Toute la cour en fut infiniment touchée. Il n’y étoit pas moins aimé et honoré que dans les troupes. Enfin, dès qu’il fut possible de transporter M. le maréchal de Lorges à Philippsbourg, Mme la maréchale de Lorges y vint de Landau l’attendre : on peut juger de la joie avec laquelle ils se revirent. J’avois été au-devant d’elle jusqu’à Landau. Toute la fleur de l’armée avoit accompagné son général à Philippsbourg, et la plupart des officiers généraux. Le lendemain M. le maréchal de Lorges, entre deux draps en carrosse, et Mme la maréchale en chaise, s’en alla à Landau suivi de tout ce qui étoit venu de plus distingué à Philippsbourg. Il s’établit au gouvernement chez Mélac qui lui étoit fort attaché, et moi chez Verpel, ingénieur, dans une très-jolie maison tout proche.

Dès le lendemain nous repartîmes tous et allâmes rejoindre l’armée. Nous couchâmes à Philippsbourg, où Desbordes, gouverneur, nous dit avoir défense du maréchal de Joyeuse de laisser passer personne pour son nouveau camp, tellement qu’il nous fallut longer le Rhin en deçà, et le passer en bateau au village de Ketsch, où on dressoit un pont. Comme l’escorte et la compagnie étoient nombreuses, le passage fut fort long ; nous primes les devants pour la plupart, et allâmes à trois lieues de là, où nous trouvâmes l’armée, sa droite à Roth et sa gauche à Waldsdorff, où étoit le quartier général ; nous y apprîmes que le maréchal de Joyeuse avoit perdu une belle occasion de battre les ennemis en venant en ce camp, qui s’étoient présentés avec peu de précaution sur les hauteurs de Malsch. Comme je n’y étois