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Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 2.djvu/197

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du camp, la commanda ce jour-là contre le maréchal de Boufflers, auprès duquel étoit Mgr le duc de Bourgogne comme le général. Le roi, Mme la duchesse de Bourgogne, les princes, les dames, toute la cour et un monde de curieux assistèrent à ce spectacle, le roi et tous les hommes à cheval, les dames en carrosse. L’exécution en fut parfaite en toutes ses parties et dura longtemps. Mais quand ce fut à la seconde ligne à ployer et à faire retraite, Rosen ne s’y pouvoit résoudre, et c’est ce qui allongea fort l’action. M. de Boufflers lui manda plusieurs fois de la part de Mgr le duc de Bourgogne qu’il étoit temps. Rosen en entroit en colère et n’obéissoit point. Le roi en rit fort qui avoit tout réglé, et qui voyoit aller et venir les aides de camp et la longueur de tout ce manège, et dit : « Rosen n’aime point à faire le personnage de battu. » À la fin il lui manda lui-même de finir et de se retirer. Rosen obéit, mais fort mal volontiers, et brusqua un peu le porteur d’ordre. Ce fut la conversation du retour et de tout le soir.

Enfin après des attaques de retranchements et toutes sortes d’images de ce qui se fait à la guerre et des revues infinies, le roi partit de Compiègne le lundi 22 septembre, et s’en alla avec sa même carrossée à Chantilly, y demeura le mardi, et arriva le mercredi à Versailles, avec autant de joie de toutes les dames qu’elles avoient eu d’empressement à être du voyage. Elles ne mangèrent point avec le roi à Compiègne, et y virent Mme la duchesse de Bourgogne aussi peu qu’à Versailles. Il falloit aller au camp tous les jours et la fatigue leur parut plus grande que le plaisir, et encore plus que la distinction qu’elles s’en étoient proposée. Le roi extrêmement content de la beauté des troupes, qui toutes avoient habillé, et avec tous les ornements que leurs chefs avoient pu imaginer, fit donner en partant six cents livres de gratification à chaque capitaine de cavalerie et de dragons, et trois cents livres à chaque capitaine d’infanterie. Il en fit donner autant aux majors de tous les régiments, et