Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 2.djvu/402

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En même temps, et je ne sais si ce fut une des conditions du marché, Mme de Soubise, toujours mal avec le duc de Rohan son frère, s’étoit raccommodée avec lui, et en avoit fait tous les pas pour faire le mariage de sa fille aînée avec le comte de La Marck, fils de la comtesse de Fürstemberg, qui n’avoit quoi que ce fût en France où il s’étoit mis dans le service, colonel d’un des régiments que le roi entretenoit fort chèrement au cardinal de Fürstemberg, desquels il lui laissoit la disposition, et dont tout le médiocre bien étoit en Westphalie sous la main de l’empereur. Ces Allemands ne se mésallient pas impunément ; celui-ci sentit ce qu’il en coûte par une triste expérience ; il ne la vouloit pas aggraver. Sa mère le vouloit marier, et un étranger qui n’a rien en France, et peu sous une coupe étrangère et souvent ennemie, n’étoit pas un parti aisé à établir. Le duc de Rohan ne comptoit ses filles pour rien et ses cadets pour peu de chose ; en donnant aussi peu qu’il voulut, il fut aisé à persuader, et le mariage fut bâclé de la sorte.

Voilà l’état du comte de La Marck. Il étoit de la maison des comtes de La Marck, dont une branche a longtemps possédé Clèves et Juliers par le mariage de l’héritière, et le cadet de cette branche a figuré ici avec le duché de Nevers, le comté d’Eu, etc., qui par deux filles héritières passèrent : Nevers à un Gonzague, frère du duc de Mantoue, Eu au duc de Guise. Une autre branche eut Bouillon, Sedan, etc., dont deux maréchaux de France, d’autres capitaines des Cent-Suisses, un premier écuyer de la reine, chevalier de l’ordre, parmi les gentilshommes ; et l’héritière de Sedan, par laquelle Henri IV fit la fortune du vicomte de Turenne, si connu depuis sous le nom de maréchal de Bouillon, qui n’en eut point d’enfants, et en garda les biens par la même protection d’Henri IV qui s’en repentit bien après. La dernière branche, et la seule qui subsiste, fut celle de Lumain. Le grand-père du comte de La Marck, dont il s’agit ici, étant veuf d’une Hohenzollern avec un fils qui lui survécut mais