Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 3.djvu/181

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M. de Chartres avoit tout cela du vivant de Monsieur, quoique petit-fils de France, mais devenu fort au-dessus par tout ce qui lui fut donné à la mort de Monsieur, M. le Prince en profita. Les pensions de Madame et de la nouvelle duchesse d’Orléans furent augmentées. Après qu’elles eurent reçu les visites et les ambassadeurs, et que les quarante jours furent passés, pendant lesquels le roi visita souvent Madame, elle alla chez lui, chez les fils de France, chez Mme la duchesse de Bourgogne, qui l’avoient, excepté le roi, été tous voir en grand manteau et en mante, et à Saint-Germain en grand habit de veuve, après quoi elle, eut permission de souper tous les soirs en public avec le roi à l’ordinaire, d’être de tous les Marlys et de paroître partout sans maille, sans voile, sans bandeau, qui, à ce qu’elle disoit, lui faisoit mal à la tête. Pour le reste de cet équipage lugubre, le roi le supprima pour ne point voir tous les jours des objets si tristes. Il ne laissa pas de paroître fort étrange de voir Madame en public, et même à la messe de Monseigneur en musique, à côté de lui, où étoit toute la cour, enfin partout en tourière de filles de Sainte- Marie à leur croix près, sous prétexte qu’étant avec le roi et chez lui elle était en famille. Ainsi il ne fut pas question un instant de couvent ni de Montargis, et elle garda à Versailles l’appartement de Monsieur avec le sien. Il n’y eut donc que la chasse de retranchée pour un temps et les spectacles ; encore le roi la fit-il venir souvent chez Mme de Maintenon l’hiver suivant, où on jouoit devant lui des comédies avec de la musique, et toujours sous prétexte de famille, et là de particulier. Le roi lui permit d’ajouter à ses dames, mais sans nom, pour être seulement de sa suite, la maréchale de Clérembault et la comtesse de Beuvron, qu’elle aimoit fort. Monsieur avoit chassé l’une et l’autre du Palais-Royal ; la première étant gouvernante de ses filles, à la place de laquelle il mit la maréchale de Grancey, et Mme de Maré, sa fille, dans la suite. L’autre étoit veuve