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Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 3.djvu/294

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françois qui l’ont obtenu pièce à pièce, est entièrement inconnu en Espagne aussi bien que dans tous les autres pays de l’Europe, qui ont des premières dignités et des charges qui répondent à nos offices de la couronne. Il n’y a donc de rang en Espagne que celui des cardinaux, des ambassadeurs et des grands d’Espagne, celui du chef ou du président du conseil de Castille étant une chose tout à fait à part, quoique supérieur à tous. On a vu ci-dessus des princes de maison souveraine attachés au service d’Espagne, faits grands pour leur vie. C’étoit le seul moyen de leur donner un rang dont ils ont joui sans jamais avoir prétendu aucune distinction particulière ni quoi que ce soit parmi les autres grands. Ceux-ci se sont soutenus avec le même avantage à l’égard des souverains qui ont été à Madrid, même les ducs de Savoie. Ceux-là, à la vérité, ne furent pas faits grands, aussi n’avoient-ils pas à y demeurer, mais ils n’en précédèrent aucun, et n’osèrent se trouver avec eux. Le seul fils de Savoie, qui fut depuis le célèbre duc Charles-Emmanuel, y eut quelque distinction, mais ce ne fut qu’après que son mariage fut arrêté avec l’infante, et en cette considération ; encore ces distinctions au-dessus des grands furent-elles assez médiocres. Du prince de Galles, qui fut depuis l’infortuné Charles Ier, on n’en parle pas : l’héritier présomptif et direct de la couronne de la Grande- Bretagne est au-dessus de toutes les règles. La comtesse de Soissons, mère du fameux prince Eugène, ne put jamais paroître en public à Madrid, ni voir la reine que dans le dernier particulier malgré sa faveur, ses manèges et ses privances, qui à la fin aboutirent à l’empoisonner, et à s’enfuir pour éviter le supplice du à son crime. Lorsque le prince et la princesse d’Harcourt accompagnèrent la même reine en Espagne, ils n’y purent obtenir aucun rang, parce que le prince d’Harcourt n’eut le caractère d’ambassadeur que pour la cérémonie du mariage qui se fit dans un méchant village, un peu au deçà de Burgos, où j’ai passé. Aucun seigneur non