Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 3.djvu/315

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

au service d’Espagne, n’en peuvent prétendre ni espérer aucun que pour être faits grands d’Espagne eux-mêmes. Je n’en dirai pas davantage pour ne pas tomber dans l’inconvénient d’une dissertation contre ces rangs étrangers qui ne sont soufferts nulle autre part qu’en France.

À ces deux avantages dont il faut convenir quoique en écorce et en surface sans fond, les grands en ont encore deux autres que les ducs avoient comme eux les honneurs militaires et civils, dont M. de Louvois les priva sous prétexte de ménager la poudre, d’où le reste des honneurs militaires et civils, se sont peu à peu évanouis pour être appropriés aux ministres qui avant cette insensible époque étoient bien éloignés d’y prétendre. Cet avantage est donc un de ceux que la dignité de duc a perdus par l’usage ; mais qui ne lui est pas moins propre qu’aux grands, puisqu’ils en ont constamment joui jusqu’à la toute-puissance de M. de Louvois vers le milieu de son ministère.

Ces quatre avantages que l’usage a conservés aux grands et ôtés aux ducs, et qui leur ont été également propres, ne consistent donc que dans lit volonté différente de leurs rois, et dans une différence de volonté si moderne qu’elle laisse voir le droit et le long usage en faveur des ducs, et laisse ainsi leur dignité entière, en cela même que le vouloir des rois y a donné pour la surface l’atteinte dont on ne peut disconvenir, mais qui ne peut rien opérer de solide contre leur dignité en faveur de celle des grands, puisque le droit et l’usage, est le même, et qu’il ne tient qu’à nos rois de le remettre comme il a été en partie jusqu’à la violence de la Ligue, et en partie jusqu’à M. de Louvois.

Les grands ont encore deux autres avantages : l’un n’est qu’un agrément et une distinction, qui est d’être seuls conviés, ainsi que leurs épouses, avec leurs fils aînés et les leurs, à tout ce qui se fait de plus ordinaire et d’extraordinaire en fêtes, divertissements et cérémonies à la cour ou ailleurs quand le roi s’y trouve, ou qu’ils se font par ses