Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 3.djvu/325

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

que ce grand honneur de parler [couvert] au roi d’Espagne s’affaiblit étrangement par les conditions qui y sont opposées ? L’introduction de la nécessité de faire la couverture, avec toute suspension de rang, honneurs et distinctions jusqu’à ce qu’elle soit faite, et cependant le pouvoir et l’usage des rois de la différer tant qu’il leur plaît, et même toujours, est un grand contrepoids ; celui d’avoir un certificat de sa couverture du secrétaire de l’estampille, sous peine, si on le perd, d’avoir à recommencer et de courir les risques des délais du roi, et en attendant d’être suspendu de tout rang, honneurs et prérogatives, n’en est pas moindre, et cela à toute mutation de père même à fils, et même pour la première classe. En France, le mort saisit le vif, sans que le roi y intervienne ; et à l’égard des pairs, dont la réception au parlement de celui en faveur duquel l’érection fixe le rang d’ancienneté pour lui et pour toute sa postérité, comme l’enregistrement le fixe pour les ducs vérifiés qui ne sont pas pairs, les successeurs à la pairie ne dépendent point de leur réception au parlement, ni d’aucune autre chose pour jouir de tout leur rang, honneurs et prérogatives, soit qu’ils s’y fassent recevoir tard ou point du tout, et ne préjudicie en aucune sorte Je choses à leurs successeurs.

En voilà bien assez, ce me semble, pour entendre quelle est la dignité des grands d’Espagne, [tant] dans son origine, son essence et son fond, que dans son écorce et son extérieur ; et le peu qui a été dit sur les ducs de France, parce qu’il auroit fallu un volume pour entrer à fond dans leur dignité, et que j’écris en France où on la doit connoître, et où on en trouve force mémoires et traités, suffit, ce me semble, pour montrer que les grands ne peuvent être comparés en rien aux pairs, et que les ducs d’Arcos et de Baños ont ignoré la dignité des ducs quand ils se sont plaints de la parité de rang et d’honneurs donnés aux uns et aux autres dans les deux royaumes.

Mais après cet examen, il faut convenir aussi que l’abus