Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 3.djvu/436

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de chambre, parce qu’il n’y étoit pas en sûreté du feu, et il ne fut question que de subsistances chacun par ses derrières, et de s’accommoder le mieux qu’on put dans les deux camps, où les deux armées subsistèrent longtemps avec un péril et une vigilance continuels. On compta avoir perdu trois mille hommes et les ennemis beaucoup plus. Ce combat fut enfin suivi d’un cartel en Italie.

J’oubliois de dire, sur la conspiration que j’ai rapportée contre la personne du roi d’Espagne, que le vice-roi de Naples en découvrit une à Naples qui devoit s’exécuter en cadence de l’autre. Un envoyé de Venise très suspect, et gagné par le cardinal Grimani, l’avoit tramée, et venoit d’être rappelé à la prière du roi à sa république. Force moines furent arrêtés, et le duc de Noja Caraffa et le prince de Trebesaccio qui en étoient les chefs. Ils avoient vingt-cinq complices, chacun de quelque considération dans leur état. Le projet étoit de se saisir d’abord du tourion[1] des Carmes. Le duc de Medina-Celi, qui, en revenant de Naples en Espagne, étoit venu faire la révérence au roi, et que M. de Torcy avoit fort entretenu, lui avoit nommé plusieurs seigneurs napolitains suspects qui se trouvèrent depuis de cette conspiration, qui fut d’abord étouffée et plusieurs complices punis.

Pour continuer de suite la même matière d’Espagne, le duc d’Ormond, avec une grosse escadre, essaya de surprendre Cadix fort dégarni. Il s’y jeta fort à propos quelques bâtiments françois chargés pour l’Amérique. Les ennemis débarquèrent, et, ne trouvant rien devant eux, s’établirent dans l’île de Léon, dix mille hommes, et leurs vaisseaux demeurés à la rade. Ils firent des courses et par leur pillage, surtout des églises, achevèrent d’indisposer le pays. On ne sauroit croire avec quel zèle tout s’offrit, tout monta à cheval, tout marcha contre eux. Ils y subsistèrent pourtant

  1. Petite tour, tourelle.