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Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 4.djvu/209

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étoient ses cadets, et à qui il auroit commandé sans difficulté si le roi l’avoit fait maréchal de France en son rang.

Quelque plausible que fût cette proposition, le roi ne put se résoudre à lui laisser commander aucun maréchal de France par voie d’autorité. Il en parla au maréchal de Villeroy, au mieux alors avec lui, qui se récria contre, émut les maréchaux de France et l’empêcha ; en sorte que Vendôme en fut refusé. Villeroy lui-même me l’a conté en s’en applaudissant. Tessé le savoit comme les autres, mais, en courtisan qui ne vouloit rien hasarder, il en reparla au roi en recevant ses ordres pour le Dauphiné et l’Italie, et lui proposa, en homme qui vouloit plaire et ne se pas attirer les bâtards, d’éviter de se trouver avec M. de Vendôme, et de ne prendre que la plus petite armée, qui avoit été commandée un temps par le grand prieur comme le plus ancien des lieutenants généraux. Le roi lui répondit en ces mêmes termes : qu’il ne falloit pas accoutumer ces messieurs-là à être si délicats, qu’il avoit trouvé très mauvais que M. de Vendôme eût osé songer à commander des maréchaux de France, et qu’en deux mots il ne vouloit point de ménagements là-dessus ni pour prendre le commandement de la principale armée ni pour se trouver avec M. de Vendôme et le commander lui-même ; que ces messieurs-là en avoient bien assez, et qu’il ne falloit ni lui ne vouloit les gâter davantage ; qu’ils l’étoient bien assez ; qu’ainsi sans avoir aucun égard à cette considération-là, il fit tout ce qu’il croiroit devoir faire pour le bien de la chose et pour l’utilité de ses affaires en Italie. Tessé, qui me l’a plus d’une fois raconté, en fut surpris au dernier point, mais, en nez fin, il ne laissa pas de biaiser pour plaire à M. de Vendôme et encore plus à M. du Maine. M. de Vendôme, de sa part, ne lui disputa rien, et il évita sagement d’en être obombré. On verra que M. du Maine, par Mme de Maintenon et par tout ce qu’elle sut employer, ne laissa pas longtemps le roi dans cette humeur. Pour M. de Vaudemont, gouverneur général