Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 5.djvu/325

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M. de Turenne acheva sa vie avec la même gloire et la même autorité auprès du roi, et la termina comme chacun sait. La majesté de ses obsèques et de sa sépulture n’eut aucun rapport à sa naissance ni à tout ce qu’il avoit acquis d’extérieur. Ce fut la récompense de ses vertus militaires et de la mort qui les couronna par un coup de canon à la tête de l’armée. Le roi défendit même très expressément que la qualité de prince fût employée nulle part à Saint-Denis ; et c’est ce qui a fait que ses neveux, qui lui ont fait faire dans cette église un superbe mausolée dans une chapelle magnifique, n’y ont fait mettre aucune épitaphe, en sorte qu’à voir ce tombeau, on ne peut conjecturer que c’est celui de M. de Turenne que par sa figure qui ressemble à tous ses portraits, et par ses armes qui n’ont d’autre ornement que la couronne de duc et des trophées. Il n’y a même aucun vers, aucune louange, parce qu’on n’a osé mettre cette précieuse qualité de prince, et qu’on n’a pas voulu montrer qu’on l’évitoit.

C’est du temps de ces deux fameux frères, que le nom d’Auvergne a peu à peu été joint à celui de La Tour. Il y a en Limousin, en Dauphiné et en d’autres provinces des maisons de La Tour, qui ne sont point de celle-ci, et qui toutes ont des armes différentes les unes des autres, et n’ont aucune parenté entre elles. Ce mot d’Auvergne s’ajouta d’abord, comme pour distinction et pour montrer de laquelle on parloit ; après, cela devint équivoque, l’attachement à ce mot pour s’en faire un nom découvrit le projet. Le cardinal de Bouillon se prétendit sorti par mâle des anciens comtes de la province d’Auvergne, cadets des ducs de Guyenne, et n’omit rien pour trouver à Cluni, qui est de la fondation de ces princes, de quoi appuyer cette chimère. Elle lui venoit sans doute de plus loin. On a vu l’affectation avec laquelle ils voulurent avoir par l’échange cette terre particulière, qui a été ailleurs plus d’une fois expliquée, et qu’on appelle le comté d’Auvergne. Le second fils du duc de