Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 5.djvu/370

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soulagement des peuples et pour le bien de l’État, il les retoucha et les perfectionna sur ceux-ci, et y mit la dernière main. Ils convenoient sur les choses principales, mais non en tout.

Boisguilbert vouloit laisser quelques impôts sur le commerce étranger et sur les denrées, à la manière de Hollande, et s’attachoit principalement à ôter les plus odieux, et surtout les frais immenses, qui, sans entrer dans les coffres du roi, ruinoient les peuples à la discrétion des traitants et de leurs employés, qui s’y enrichissoient sans mesure, comme cela est encore aujourd’hui et n’a fait qu’augmenter, sans avoir jamais cessé depuis.

Vauban, d’accord sur ces suppressions, passoit jusqu’à celle des impôts mêmes. Il prétendoit n’en laisser qu’un unique, et avec cette simplification remplir également leurs vues communes sans tomber en aucun inconvénient. Il avoit l’avantage sur Boisguilbert de tout ce qu’il avoit examiné, pesé, comparé, et calculé lui-même en ses divers voyages depuis vingt ans ; de ce qu’il avoit tiré du travail de ceux que dans le même esprit il avoit envoyés depuis plusieurs années en diverses provinces ; toutes choses que Boisguilbert, sédentaire à Rouen, n’avoit pu se proposer, et l’avantage encore de se rectifier par les lumières et les ouvrages de celui-ci, par quoi il avoit raison de se flatter de le surpasser en exactitude et en justesse, base fondamentale de pareille besogne. Vauban donc abolissoit toutes sortes d’impôts, auxquels il en substituoit un unique, divisé en deux branches, auxquelles il donnoit le nom de dîme royale, l’une sur les terres par un dixième de leur produit, l’autre léger par estimation sur le commerce et l’industrie, qu’il estimoit devoir être encouragés l’un et l’autre, bien loin d’être accablés. Il prescrivoit des règles très simples, très sages et très faciles pour la levée et la perception de ces deux droits, suivant la valeur de chaque terre, et par rapport au nombre d’hommes sur lequel on