Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 7.djvu/308

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qui y étoient présentes, et qui tous trois l’avoient prié de continuer à écouter et ramener les mécontents, et â presser son retour en Espagne dont il étoit lors près de partir.

Il ajouta qu’il étoit vrai qu’il savoit beaucoup de malversations et de dangereux manéges de la princesse des Ursins, qui ne pouvoient tourner qu’à la ruine de Leurs Majestés Catholiques et de leur couronne ; que Mme des Ursins, qui s’en doutoit peut-être, craignoit en lui ces connoissances, et pour cela ne vouloit pas qu’il retournât ; mais qu’il avoit si bien retenu ce que Sa Majesté lui avoit prescrit, qu’il osoit la prendre elle-même à témoin que c’étoit là la première fois qu’il prenoit la liberté de lui en parler ; que, quelque nécessité qu’il vit à lui en rendre compte, il l’eût toujours laissé dans le silence, s’il ne l’eût lui-même obligé à le rompre là-dessus en lui parlant de l’éloignement de Mme des Ursins pour lui, également ignoré et non mérité par lui.

Le roi pensa un moment, puis lui dit que, les choses en cet état, il croyoit plus à propos qu’il s’abstînt de le renvoyer en Espagne ; que les affaires se trouvoient en une crise où on doutoit à qui elle demeureroit ; que, si son petit-fils en sortoit, ce n’étoit pas la peine d’entrer en rien sur l’administration de Mme des Ursins ; que, s’il conservoit cette couronne, il seroit à propos alors de parler à fond de cette administration, et qu’il seroit en ce temps-là bien aise d’en consulter son neveu.

M. le duc d’Orléans s’en tint là, et me le conta, médiocrement fâché à ce qu’il me parut, et moi plus que lui par les raisons qui ont été rapportées. Il me dit que cette intrigue s’étoit toute conduite de Le des Ursins à Mme de Maintenon immédiatement, et c’étoit du roi qu’il l’avoit appris, c’est-à-dire que Mme des Ursins s’étoit adressée à Mme de Maintenon là-dessus sans aucun autre canal intermédiaire, aussi n’en avoit-elle pas besoin, surtout sur une vengeance commune.