Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 7.djvu/350

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duc de Mantoue n’avoit rien disputé au grand-duc, et d’une petite-fille de France à Mme de Mantoue la distance étoit encore tout autre ; aussi fut-elle bien relevée, et contribua-t-elle fort à la réduction de tant de folies à raison. Mme de Mantoue ne fit pas la moindre civilité à Mme la grande-duchesse sur ce qu’il se passoit ; mais vingt-quatre heures après, elle eut ordre d’aller demander pardon à Mme la grande-duchesse, qui, amie de Mme de Lislebonne, passa la chose doucement.

Mme d’Elboeuf fit écrire sa fille sur l’aventure de M. de Montbazon à Torcy, comme ministre des affaires étrangères. Elle n’eut point de réponse. Elle écrivit une seconde fois longuement et fort hautement. Torcy en rendit compte une seconde fois, porta la lettre au conseil ; elle y fut moquée et trouvée très ridicule. Torcy eut ordre de lui conseiller d’abandonner cette affaire, dont elle ne tireroit aucune raison, et de ne se pas commettre à s’en faire de nouvelles. La mortification fut si publique et si sensible, qu’elle corrigea enfin Mme de Mantoue de tout hasarder, et la persuada enfin d’abandonner ses projets pour éviter de nouveaux dépôts. Elle comprit qu’ils ne se pouvoient soutenir destitués des protections dont elle s’étoit flattée, et qu’elle et sa mère étoient trop faibles pour en faire réussir aucun.

Elle se résolut donc à renoncer à la cour, où on ne vouloit point d’elle, et à des prétentions qui la renfermoient chez elle dans la solitude et l’ennui. Elle prit maison à Paris, envoya complimenter toutes les dames un peu considérables, dans l’espérance de les engager à la première visite. Voyant que la tentative ne réussissoit pas, elle fit répandre tant qu’elle put qu’elle ne savoit sur quoi fonder qu’on lui croyoit des prétentions chimériques, qu’elle désiroit qu’on fût persuadé qu’elle ne vouloir pas vivre autrement que si elle étoit encore fille, qu’elle étoit offensée qu’on s’imaginât autre chose, qu’elle comptoit être si attentive à toutes sortes de devoirs et de politesse qu’on ne pourroit s’empêcher de