Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 7.djvu/58

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les mines, pour ne pas dire les singeries hypocrites d’un homme qui redoutoit cette place, et qui ne s’y laissa forcer que par obéissance à sa compagnie.

Je me suis étendu sur ce nouveau confesseur parce que de lui sont sorties les incroyables tempêtes sous lesquelles l’Église, l’État, le savoir, la doctrine et tant de gens de bien de toutes les sortes, gémissent encore aujourd’hui, et parce que j’ai eu une connoissance plus immédiate et plus particulière de ce terrible personnage qu’aucun homme de la cour.

Mon père et ma mère me mirent entre les mains des jésuites pour me former à la religion, et y choisirent fort heureusement ; car, quelque chose qu’il se publie d’eux, il ne faut pas croire qu’il ne s’y trouve par-ci par-là des gens fort saints et fort éclairés. Je demeurai donc où on m’avoit mis, mais sans commerce avec d’autres qu’avec celui à qui je m’adressois ; celui-là avoit le soin en premier des retraites qu’ils donnoient à leur noviciat à des séculiers plusieurs fois l’année. Il s’appeloit le P. Sanadon, et son emploi le mettoit en relations nécessaires avec les supérieurs, par conséquent avec le P. Tellier, provincial, lorsqu’il fut choisi pour être confesseur. Ce P. Tellier, de son goût et de son habitude farouche, ne voulut voir que ce qui lui fut impossible d’éviter. À son goût se joignit aussi la politique, pour se montrer au roi plus isolé, en effet pour être plus indépendant et se dérober mieux aux égards et aux sollicitations.

Je fus fort surpris que quinze jours ou trois semaines après qu’il fut dans ce ministère, car c’en étoit un très-réel, fort séparé des autres, le P. Sanadon me vint dire qu’il vouloit m’être présenté, ce furent ses termes et ceux du P. Tellier lorsqu’il me l’amena le lendemain. Je ne l’avois jamais vu, et je n’avois été, ni [n’avois] envoyé lui faire compliment ; il m’en accabla, et conclut par me demander la permission de me venir voir quelquefois, et la grâce de