Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 11.djvu/320

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et accoutuma les plus grands de l’État à y recourir quand ils se croyoient lésés, dans les cas les plus majeurs, et qui n’avoient aucun trait, je ne dis pas seulement à la compétence du parlement, mais à ses usurpations.

Jamais il n’avoit osé lever les yeux jusqu’à s’arroger rien sur les régences. Le duc d’Orléans, depuis roi sous le nom de Louis XII, piqué d’en être exclu quoique le plus prochain mâle du sang royal, et d’en voir une femme revêtue par la volonté de Louis XI mourant et le consentement de ceux à qui il appartenoit de le donner, en faveur de la dame de Beaujeu, sa fille, sœur fort aînée de Charles VIII, mineur, adressa ses plaintes au parlement. Il lui répondit, par la bouche du premier président de La Vacquerie, ces célèbres paroles si connues et si exactement transcrites dans toutes les histoires : « que le parlement étoit une cour de justice établie seulement pour administrer la justice au nom du roi à ses sujets, non pour se mêler des affaires d’État et des grandes sanctions du royaume, si ce n’étoit par très exprès commandement du roi, » par quoi le duc d’Orléans ne put pas seulement se faire écouter, et de là prit les armes avec le triste succès pour lui que chacun sait [1].

Ce témoignage si authentique du premier président de La Vacquerie en plein parlement, et magistrat illustre par le poids de ses mœurs et de sa doctrine, est une vérité dont l’évidence et la notoriété de droit et de fait a paru trop pesante à ses successeurs, et à ceux qui dans les suites ont succédé aux autres offices du parlement.

Les anciennes usurpations convioient à de nouvelles, aussi le parlement trouva-t-il bien mauvais de n’avoir nulle part aux régences de Catherine de Médicis, et cria-t-il aussi haut que vainement de ce qu’elle fit au parlement de Rouen, avec les pairs et les officiers de la couronne, la déclaration de la

  1. Louis d’Orléans fut vaincu et fait prisonnier à la journée de Saint-Aubin du Cormier, en 1468.