Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 11.djvu/437

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chancelier qui prend la main sur le premier président et sur tous, et, à l’ordinaire de la vie, ne donne la main chez lui à aucun magistrat, ni la chancelière, qui a d’ailleurs un rang fort inférieur au sien, ne donne aussi la main chez elle ni à la première présidente ni à aucune femme de robe, et la donne néanmoins à toutes les autres, à la différence du chancelier qui ne la donne qu’aux gens titrés. Voilà donc une supériorité entière du chancelier sur le premier président et sur tous les présidents qui, en corps, et le premier président en particulier, lui écrivent monseigneur et en reçoivent réponse fort disproportionnée. Le conseil privé, ou des parties, qui casse les arrêts du parlement, n’a qu’un seul président qui est le chancelier. En prenant les avis il est couvert, et le demeure lorsque les conseillers d’État se découvrent lorsqu’il les nomme pour opiner. Il n’ôte son chapeau qu’en nommant le doyen du conseil, et le nomme M. le doyen, et non par son nom comme il fait tous les autres conseillers d’État. Lorsqu’il y a eu des pairs, même M. de Vitry, qui n’étoit que duc à brevet et conseiller d’État d’épée, le chancelier s’est toujours découvert pour eux, et l’exemple de MM. de Reims et de Noyon en est récent. Que l’on compare maintenant le chancelier et le premier président et leur très différent usage ; qu’est-il possible que les présidents y répondent qui se puisse souffrir ? En voilà assez sur cette étrange affaire qui gagna le mois de mars 1715. Sa nature a obligé à un récit de suite et non interrompu ; reprenons maintenant les matières accoutumées, et revenons sur nos pas au 1er janvier 1715. Toutefois il ne faut pas que l’empressement de finir une si désagréable matière fasse omettre que M. du Maine avoit payé d’avance le premier président, presque immédiatement avant de l’entamer. Ce magistrat, qui étoit un panier percé qui jetoit à tout, et beaucoup en breloques, avoit toujours grand besoin d’argent, et se gouvernoit fort par ce continuel désir. Il avoit quatre cent mille livres de brevet de retenue qu’il avoit