Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 12.djvu/362

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envoyez-le donc chercher. » Je répondis fort étonné qu’il étoit à Marly. « Oh bien, envoyez-y donc tout à l’heure le chercher, car je meurs d’envie de l’embrasser, et il faut bien qu’il aille voir la maréchale de Grammont et sa prétendue. » Je ne sortois point d’étonnement d’une telle franchise, qui apprenoit tout à son domestique et au nôtre, qui étoient là en foule. Nous montions cependant le commencement du degré. Mme de Saint-Simon descendoit en même temps, et nous fit redescendre le peu que nous avions monté, pour faire entrer le cardinal dans mon appartement et ne lui pas donner la peine de monter en haut. Jamais je ne vis homme si aise. Il nous dit que la maréchale de Grammont et sa fille étoient ravies ; que tout étoit accordé ; qu’il avoit voulu se donner la satisfaction de nous le venir dire et de le déclarer tout haut, comme il avoit fait, parce que, au nombre de grands partis en hommes qui n’attendoient que ce moment, de leur connoissance à tous, pour faire des démarches pour ce mariage, il n’y avoit de bon qu’à bâcler et déclarer pour leur fermer la bouche et arrêter par là tous les manèges qui se font pour faire rompre et se faire préférer, au lieu qu’il n’y a plus à y penser quand les choses sont faites, déclarées et publiées par les parties mêmes ; qu’il aimoit mieux qu’on le dit un radoteur d’avoir déclaré si vite, et que cela fût fini. Après mille amitiés il s’en alla à ses vêpres. Il fut convenu que le jour même Mme de Saint-Simon irait au Bon-Pasteur, où elle trouveroit la maréchale de Grammont dans sa tribune. Mon fils arriva le soir.

Le lendemain, comme nous dînions avec assez de monde au logis, arrivèrent tous les Grammont et plusieurs Noailles, mais non la future, sa mère ni sa grand’mère, de manière qu’il n’y eut rien de plus public, et la maréchale de Grammont vint au logis dès l’après-dînée. Mon fils, qui les alla voir et la maréchale de Grammont, et que je menai chez le cardinal, retourna le soir à Marly pour demander au roi l’agrément