Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 13.djvu/122

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de la grand’chambre, mais clerc, et en la même place de Dreux pour être mieux entendu. Le duc du Maine la sentit et en pâlit, car il n’étoit appliqué qu’à jeter les yeux sur tous les visages, et les miens le suivoient de près tout en écoutant, et regardant de fois à autre la contenance de M. le duc d’Orléans.

La lecture achevée, ce prince prit la parole, et passant les yeux sur toute la séance, se découvrit, se recouvrit, et dit un mot de louange et de regret du feu roi. Élevant après la voix davantage, il déclara qu’il n’avoit qu’à approuver tout ce qui regardoit l’éducation du roi, quant aux personnes, et ce qui se trouvoit sur un établissement aussi beau et aussi utile que l’étoit celui de Saint-Cyr, dans les dispositions qu’on venoit d’entendre ; qu’à l’égard de celles qui regardoient le gouvernement de l’État, il parleroit séparément de ce qui en étoit contenu dans le testament et dans le codicille ; qu’il avoit peine à les concilier avec ce que le roi lui avoit dit dans les derniers jours de sa vie, et avec les assurances qu’il lui avoit données publiquement qu’il ne trouveroit rien dans ses dispositions dont il pût n’être pas content, en conséquence de quoi il avoit lui-même toujours depuis renvoyé à lui pour tous les ordres à donner, et ses ministres pour les recevoir sur les affaires ; qu’il falloit qu’il n’eût pas compris la force de ce qu’on lui avoit fait faire, regardant du côté du duc du Maine, puisque le conseil de régence se trouvoit choisi, et son autorité tellement établie par le testament qu’il ne lui en demeuroit plus aucune à lui ; que ce préjudice fait au droit de sa naissance, à son attachement pour la personne du roi, à son amour et à [sa] fidélité pour l’État, étoit de nature à ne pouvoir le souffrir avec la conservation de son honneur ; et qu’il espéroit assez de l’estime de tout ce qui étoit là présent pour se persuader que sa régence seroit déclarée telle qu’elle devoit être, c’est-à-dire entière, indépendante, et le choix du conseil de régence, à qui il ne disputoit pas la voix délibérative pour les affaires,