Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 14.djvu/338

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autorité que d’eux-mêmes, soi-disant l’ordre de la noblesse, signèrent et présentèrent comme telle une requête au parlement pour demander que l’affaire d’entre les princes du sang et bâtards fût renvoyée aux états généraux du royaume, parce que, s’y agissant du droit d’habilité à la succession à la couronne, il n’y avoit en cette matière de juges compétents que les états généraux du royaume, et entre ces trois états, le seul second ordre qui est celui de la noblesse. L’audace étoit sans exemple. C’étoient des gens ramassés, sans titre et sans pouvoir, qui usurpoient le respectable nom de la noblesse, qui, n’ayant point été convoquée par le roi, ne pouvoit faire corps, s’assembler, députer, donner des instructions, ni autoriser personne ; ainsi, dès là, très punissables. Usurpation pourquoi faite ? Pour attenter à l’autorité du régent, et sans être, sans existence, sans consistance, lui arracher une cause si majeure pour s’en saisir eux-mêmes, sans autre droit que leur bon plaisir. L’ineptie n’étoit pas moindre. Dans leur folle prétention, ils étoient la noblesse en corps, par conséquent le second ordre de l’État ; et ce second ordre de l’État, si auguste et si grand, se prostitue à cette bassesse sans exemple de présenter une requête à autre qu’au roi, de la présenter à un tribunal de justice qui, si relevé qu’il soit, n’est que membre, et non pas ordre de l’État, et non seulement membre d’un ordre, mais du troisième, qui est le tiers état, si disproportionné de l’ordre de la noblesse, et ce prétendu ordre de la noblesse, encore présente à ce simple tribunal de justice, membre du tiers état, une requête intitulée : À nos seigneurs de parlement, supplient, etc. Ce n’est pas la peine d’être si glorieux, si fous et si enivrés de sa naissance, et de l’état que l’orgueil et la vanité insensée lui veut attribuer, que de la mettre ainsi sous les pieds d’une compagnie de gens de loi, et d’invoquer son autorité pour user, par sa protection et son prétendu pouvoir, de celui qu’on prétend ne tenir que de sa naissance, en chose si capitale que la décision sur la