Aller au contenu

Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 14.djvu/344

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

chez son beau-père, le premier écuyer, où il vivoit dans la plus aveugle dépendance. On a vu ailleurs ce que c’étoit que Mme de Beringhen et le duc d’Aumont son frère, à quel point ils étoient vendus au premier président, et le premier écuyer d’ailleurs son ami intime, et d’ancienneté tout aux bâtards. Son gendre, sottement glorieux d’ailleurs et fort court d’esprit, goba aisément ce prestige de noblesse, crut figurer, et obéit à beau-père et à belle-mère, et aux jargons du duc d’Aumont. Le crime étoit complet, 1° de se prétendre être la noblesse ne pouvant être que des particuliers, par toutes les raisons palpables qu’on en a vues ci-dessus ; 2° de s’assembler contre la défense expresse à eux faite par le régent ; car faire une requête souscrite de trente-neuf signatures et présentée au parlement par six seigneurs en personne n’est pas chose qui se puisse sans s’être concertés, et pour cela nécessairement assemblés ; 3° se mêler de choses supérieures à tous particuliers comme tels ; 4° d’oser implorer l’autorité du parlement pour arrêter le jugement d’une affaire dont le régent du royaume est saisi, qu’il a déclaré qu’il va juger, qui s’y est engagé par des démarches juridiques et publiques, pour lui en ôter la connoissance, comme si le parlement pouvoit plus que le régent, et pour la faire renvoyer à un tribunal qui n’existe point. Le régent sentit qu’il falloit opter entre lâcher tout à fait les rênes du gouvernement et faire une punition exemplaire. Il porta cette requête au conseil de régence, où elle nous fut lue avec les signatures. On en raisonna sans opiner, et le régent en parut fort altéré ; mais ceux qui l’obsédoient, aidés de sa faiblesse et de sa facilité, de plus contredits de personne, car moi ni pas un autre duc n’en dîmes pas un seul mot, trouvèrent moyen de tourner cette punition de la manière la plus singulière.

On fit l’honneur à ces six messieurs qui avoient été au parlement présenter la requête, de les faire arrêter par des exempts des gardes du corps, le samedi matin 19 juin, qui