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Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 14.djvu/421

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l’impossibilité de vendre son diamant au prix qu’il l’avoit espéré, le dommage et la perte qu’il souffriroit en le coupant en divers morceaux, qu’il le fit venir enfin à deux millions avec les rognures en outre qui sortiroient nécessairement de la taille. Le marché fut conclu de la sorte. On lui paya l’intérêt des deux millions jusqu’à ce qu’on lui pût donner le principal, et en attendant pour deux millions de pierreries en gage qu’il garderoit jusqu’à entier payement des deux millions.

M. le duc d’Orléans fut agréablement trompé par les applaudissements que le public donna à une acquisition si belle et si unique. Ce diamant fut appelé le Régent. Il est de la grosseur d’une prune de la reine Claude, d’une forme presque ronde, d’une épaisseur qui répond à son volume, parfaitement blanc, exempt de toute tache, nuage et paillette, d’une eau admirable, et pèse plus de cinq cents grains. Je m’applaudis beaucoup d’avoir résolu le régent à une emplette si illustre.




CHAPITRE XVIII.


Le czar vient en France, et ce voyage importune. — Origine de la haine personnelle du czar pour le roi d’Angleterre. — Kurakin ambassadeur de Russie en France ; quel. — Motifs et mesures du czar qui veut, puis ne veut plus être catholique. — Courte réflexion sur Rome. — Il est reçu à Dunkerque par les équipages du roi, et à Calais par le marquis de Nesle. — Il est en tout défrayé avec toute sa suite. — On lui rend parfois les mêmes honneurs qu’au roi. — On lui prépare des logements au Louvre et à l’hôtel de Lesdiguières, qu’il choisit. — Je propose au régent le maréchal de Tessé pour le mettre auprès du czar pendant son séjour, qui l’attend à Beaumont. — Vie que menoit le maréchal de Tessé. — Journal du séjour du