Aller au contenu

Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 14.djvu/453

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

et d’assurer au fils aîné du second lit du roi d’Espagne les successions de Florence et de Parme. Cet ambassadeur étoit même persuadé que l’Espagne recouvreroit la Sicile lorsqu’on s’y attendroit le moins.

Albéroni Était bien aise d’insinuer aux états généraux ces différentes vues, parce qu’il craignoit plutôt qu’il ne souhaitoit la paix avec l’empereur. Dans la prévoyance des événements qui pouvoient arriver, il évitoit d’engager de nouveau le roi d’Espagne, soit en confirmant les engagements déjà pris, soit par de nouvelles cessions dont l’Europe deviendroit garante. Il disoit que la main de Dieu n’étoit pas raccourcie, et par ce discours il laissoit assez entendre ce qu’il avoit dans l’esprit. C’est une chose étrange qu’être possédé de l’esprit de retour, et de n’oser en laisser rien apercevoir ni à la France ni à l’Espagne.

Dans ce même esprit il profita de la conjoncture de plusieurs écrits contre la constitution qui avoient été brûlés publiquement à Rome. Il fit écrire au pape par leur fidèle Aubenton des merveilles de la piété du roi d’Espagne, et de son inséparable attachement au chef de l’Église ; quoiqu’il pût arriver dans cette affaire. Ces mêmes écrits que Cellamare avoit envoyés furent livrés à l’inquisition d’Espagne pour y être brûlés. Cellamare eut ordre de ne plus envoyer d’écrits faits contre la constitution, mais tous ceux au contraire qui lui étoient favorables, tandis que le cardinal Acquaviva reçut ordre d’éviter avec soin de prendre aucun parti dans ces différends et de se contenter simplement de rendre compte des suites qu’ils, pourroient avoir : c’est-à-dire qu’Albéroni vouloit donner au pape une grande idée de l’attachement du roi d’Espagne pour la saine doctrine, et de son horreur pour les nouveautés, en même temps que ce ministre se vouloit ménager soigneusement la France, et ne pas donner aussi trop d’assistance au pape dans une conjoncture où il en étoit aussi mécontent.

Toutefois il pressoit l’armement de la flotte comme l’instrument